À l’été 2012, une vidéo sur le harcèlement de rue filmé en caméra cachée devenait virale. Sofie Peeters, son autrice, était alors étudiante à Bruxelles et souhaitait rendre compte des actes qu’elle subissait en tant que jeune femme dans ses déplacements quotidiens. « La ville est pensée par et pour les hommes, elle appartient aux hommes » constatait alors le géographe Yves Raibaud. Depuis, différentes études ont entériné le propos (1) et l’ont étendu à l’enfance à travers l’exemple de la répartition de l’espace entre les genres dans les cours de récréation (2). Yves Raibaud explique que les violences faites aux femmes sont l’aboutissement d’un continuum social sexiste, et ajoute : « avec le harcèlement de rue, la ville reste le domaine des hommes. » (3)
On ne parle guère de ce type de faits envers les adolescentes, elles y sont pourtant particulièrement sujettes. C’est généralement au cours du collège que les filles obtiennent l’autorisation de se déplacer dans les espaces publics, seules ou à plusieurs. Tout comme leurs aînées, elles y sont en proie aux remarques ou sollicitations à caractère sexuel, voire aux agressions de la part d’hommes majeurs. Si faire l’expérience du harcèlement de rue quand on est si jeune peut parfois être traumatisant, il est marquant dans tous les cas et va modifier durablement l’appréhension des lieux publics et même le rapport au fait de sortir.
Depuis 2018 avec la Loi Schiappa, les personnes mineures peuvent déposer une plainte pour « outrage sexiste et sexuel » aggravé du fait de leur minorité, mais pas introduire seules une action en justice. S’il se passe quelque chose de grave, il faut en parler à un adulte. Mais comment le dire sans risquer de perdre une nouvelle liberté, celle de sortir ? Cette série entend leur donner la parole.
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Références :
1. Le Centre Hubertine Auclert a publié en 2018 un rapport alliant données sur ces inégalités et préconisations pour plus d’inclusivité. Claire Hancock, chercheuse en géographie et professeure à l’Université de Créteil, a également publié plusieurs études sur les « injustices spatiales » dont sont victimes les femmes.
2. Nous renvoyons au livre d’Edith Maruéjouls, « Faire je(u) égal: penser les espaces à l’école pour inclure tous les enfants » (Double Ponctuation 2022).
3. Dans une interview pour les Inrocks publiée le 1 octobre 2015 : https://urlz.fr/q5uK.

Emilie, 18 ans - Liffré (Bretagne)


Mariama, 18 ans - Paris (Île-de-France)


Amel, 19 ans - Roubaix (Hauts-de-France)



Wicem, 26 ans - Arras (Hauts-de-France)


Louise, 23 ans - Tours (Centre-Val de Loire)


Mila, 19 ans - Paris (Île-de-France)

